Bonfils Frédéric
6 avr. 20222 Min
Mis à jour : 13 sept. 2022
Contrairement à ce que nous pourrions attendre, Après Jean-Luc Godard / Je me laisse envahir par le Vietnam, n’est pas un spectacle sur Jean-Luc Godard. Ce n’est ni une adaptation de ces films ni un portrait ou un hommage, c´est une œuvre théâtrale à part entière, d’après Jean-Luc Godard qui se propose de plonger dans son esprit de créateur, de penseur et de chercheur du cinéma.
Le jeune metteur en scène, Eddy D’aranjo, pour son premier spectacle après l’École du TNS, expérimente, repousse les lignes, les limites du théâtre tout comme Godard a repousser celles du cinéma et reprend un de ces thèmes de prédilection Le cinéma est mort, pour l’appliquer, avec puissance et sincérité au théâtre.
Ces immenses films comme À bout de souffle, Pierrot le Fou, Vivre sa vie ou Le mépris, sa période d’après 68, avec le collectif expérimental Dziga Vertov, ou celle des années 80 pendant laquelle, lui-même, a rejeté en bloc ces propres films et le cinéma tout entier.
Eddy D’aranjo nous propose de vivre une expérience unique, performative et brillamment intelligente où les styles narratifs entremêlés conversent avec l’esprit de Godard.
Avec l’envie de prendre soin de ce qui est en train de disparaître ou a déjà disparu, les scènes sans cohérences temporelles apparentes, vont s’enchaîner et nous entraîner dans une variation mélancolique et délicate avec la mort.
Ce territoire du deuil se découvre d’abord par une fiction familiale très intime (Pleurer Jeannot) qui, peu à peu, se défait des mots et se rapproche d’une performance rituelle. La lumière change alors et le spectacle passe au discours direct, plus proche du théâtre-récit et de la tradition documentaire.
Dans cette seconde partie (Un spectacle en train de disparaître), Volodia Piotrovitch d’Orlik, le passionnant et troublant comédien, jusqu’ici caché sous le masque de Jeannot, revient, seul sur scène, face au public, puis face caméra. Il va, dans un premier temps, analyser, déconstruire et ausculter le spectacle puis inviter le réel historique et l’expérience moderne de la violence radicale afin d’examiner le pouvoir des images.
Le cinéma est mort d’avoir failli à sa mission : montrer, et dessiller nos yeux qui ne voient pas. Extrait
« Finalement, commencer par vraiment « faire du théâtre » avant de le « défaire » m’a semblé l’opération la plus juste ». Avec cette expérience théâtrale unique et exigeante, aussi étrange que merveilleuse, aussi génante que bouleversante, Eddy D’aranjo, avec la fougue de la jeunesse, rend le plus bel hommage artistique au maitre énigmatique, Jean-Luc Godard. Avis de Foudart 🅵🅵🅵
Texte, conception et mise en scène Eddy D’aranjo
Avec Majda Abdelmalek, Nans Merieux, Volodia Piotrovitch d’Orlik, Bertrand de Roffignac, Léa Sery et Édith Biscaro, Clémence Delille
Collaboration artistique Volodia Piotrovitch d’Orlik
Scénographie et costumes Clémence Delille
Collaboration technique Edith Biscaro
Lumière Anne-Sophie Mage
Son Saoussen Tatah
Vidéo Typhaine Steiner
Copyright Willy Vainqueur
Durée 2h45
17, bd Jourdan 75014 Paris
Du 4 au 19 avril 2022
lundi, vendredi – 20 h
sauf vendredi 8 avril – 19h mardi, jeudi, samedi – 19 h relâche mercredi et dimanche