Marina Otero, chorégraphe, danseuse et performeuse argentine, s'impose comme une figure incontournable de la scène artistique alternative. Son œuvre, profondément marquée par l’autofiction, explore les frontières entre la réalité et la fiction, mettant son propre corps et sa vie au cœur de ses créations.
Avec Fuck Me, Marina Otero fait voler en éclats les conventions et la bienséance avec une création où le corps est à la fois un cri et une confession, une lutte et une offrande.
À travers cette performance, la chorégraphe argentine explore avec audace et sensualité l’intimité d’un corps brisé, épuisé par le temps, mais toujours vibrant de vie et de désir. Sur scène, cinq danseurs masculins, symboles de la virilité exacerbée, sont nus, dans une chorégraphie érotique où cuir, latex et sueur forment une symphonie provocante. Leurs corps, déformés et magnifiés, deviennent les doubles d’Otero, projetant ses propres angoisses et blessures. Mais derrière cette mise en scène troublante se cache une vérité plus crue, celle d’un corps féminin qui, affaibli par les accidents et les années, ne peut plus danser, mais refuse de s'effacer.
Otero, tantôt clouée à sa chaise, tantôt se traînant sur scène avec peine, observe, commande, orchestre. Sa colonne vertébrale fracassée, elle délègue son mouvement aux cinq « Pablo », des avatars de ses fantasmes, de ses regrets, de son passé. Ce transfert de la puissance scénique n'est pas une abdication, mais une affirmation de sa souveraineté.
Chaque geste, chaque danse qu’elle ne peut plus exécuter, devient un moyen de s'affirmer dans la douleur, dans l'humiliation consentie, mais aussi dans une forme de contrôle absolu.
Au-delà de la Simple Provocation Érotique
Fuck Me est un cri de résistance contre l’inéluctabilité du temps, un élan désespéré vers la vitalité. Dans cette mise à nu radicale, Marina Otero plonge dans les tréfonds de son histoire personnelle et familiale, revenant sur les zones d’ombre laissées par la dictature argentine, dont son propre grand-père fut une figure ambivalente. Cette introspection, qui mêle mémoire collective et histoire intime, fait de son corps meurtri le terrain de toutes les luttes, celles de l’individu contre le pouvoir, contre le vieillissement, contre l’oubli.
Et pourtant, malgré la gravité des thèmes abordés, Fuck Me regorge d’une énergie explosive, d’une vitalité parfois ludique, parfois tragique. Les danseurs, ces « Pablos » magnifiés, portent sur leurs épaules non seulement la fragilité de Marina Otero, mais aussi celle d'une humanité confrontée à ses propres limites. Ils dansent pour elle, pour ce corps qui se meurt, mais qui ne cesse de résister. Dans cet espace entre l’agonie et la révolte, Otero interroge ce que signifie vivre, aimer, se souvenir, créer.
La pièce se termine dans une explosion d’énergie qui laisse le spectateur bouleversé, ébranlé, face à la condition humaine, à ce corps qui raconte mille histoires, toutes aussi vraies les unes que les autres.
Une œuvre qui fait Trembler, qui Fascine, mais qui ne laisse jamais Indifférent
Avec Fuck Me, Marina Otero nous offre un spectacle aussi audacieux qu'émouvant, où la vulnérabilité devient force, où l’intime se fait politique, où la douleur devient sublime.
Une œuvre terriblement humaine, terriblement sexy, terriblement vivante. Avis Foudart 🅵🅵🅵🅵
Fuck Me
Dramaturgie et mise en scène Marina Otero
Avec Augusto Chiappe, Cristian Vega, Fred Raposo, Juan Francisco, López Bubica, Matías Rebossio, Miguel Valdivieso, Marina Otero
Conception de l’espace et de l’éclairage Adrián Grimozzi • Conception des costumes Uriel Cistaro • Conception sonore et musique originale Julián Rodríguez Rona • Conseil dramaturgie Martín Flores Cárdenas
Photographie Matías Kedak
THÉÂTRE DU ROND-POINT
18 — 22 septembre 2024 • Mercredi, jeudi et vendredi, 21h — Samedi, 20h — Dimanche, 17h • Durée 1h10 • À PARTIR DE 16 ANS
Prix du Public ZKB - Theater Spektakel 2021
18 — 22 septembre 2024
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