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Groenland. La Scala Paris

Dernière mise à jour : 19 mars 2021

Tout d’abord, un texte splendide de Pauline Sales.

Une mère part, une nuit, avec sa petite fille, pour le Groenland. Elle a quitté sa maison, son mari, elle veut l’emmener vers les étendues, la neige, l’infini. Elle lui raconte des histoires, elle nous raconte son histoire. Elle veut que sa petite fille lui lâche la main…

Ce n’est pas une fuite, c’est un exil.


Pauline Sales compose l’être femme, son sexe, sa place, son rapport à la maternité, à l’abandon, au suicide, elle tisse une partition du départ, du dénuement, du froid. Quelque chose mue se défait, une peau sociale, comme un rite régressif : une mère et sa petite fille, une femme et une enfant, une femme-enfant. Sur le plateau, un piano demi-queue (électrique), comme un iceberg à la dérive, sur des compositions de Béla Bartók : un contrepoint ou une réponse de l’enfance, une fugue, une figure paternelle immobile.


Et puis, une comédienne, actrice, auteure. Géraldine Danon. Un peu ici, beaucoup ailleurs sur un bateau. Géraldine, en compagnie de son mari, a passé trois fois le cap Horn et ce n’est pas rien.


Si on voit la pièce telle qu’elle, on peut être désorienté mais quand on connaît un peu la vie de Géraldine Danon, la perception devient tout autre. Ce texte qui n’a pas du tout écrit pour elle, lui colle à la peau totalement et ça en devient troublant. Ce seul en scène prend alors tout son intérêt.


Le visage est beau, l’allure élégante mais les mots sont rudes, âpres. Rien ne nous est épargné et je pense très sincèrement que cette pièce est plus adaptée à un public féminin. Je ne me sens pas être uniquement masculin, la question de genre dans la société d’aujourd’hui ne m’intéresse pas vraiment mais je me suis aperçu qu’il devait rester en moi, tout de même quelques rémanences d’homme de Cro-Magnon. Le rapport à la maternité, aux règles ou autres reste encore des sujets tabous qui me bousculent et me dérange (j’aime être bousculé, au théâtre).


Je parle pour moi mais un peu, aussi, au nom des hommes, en général car en sortant, j’ai pu discuter avec plein de monde et le constat était assez identique. Cette pièce n’est pas évidente. J'y ai vu de la folie alors que l’on ne parle que d’un voyage (peut-être initiatique), finalement.


Quand l’émotion personnelle se mêle de notre jugement. Il est très intéressant de voir comment cela peut troubler notre perception. C’est un constat très instructif et, finalement agréable.


La force de cette pièce, d’après moi, c’est l’association de ce texte et de cette comédienne d'apparence si normale et bourgeoise et pourtant si différente et profonde. Le livre de Géraldine Danon qui vient de sortir est à lire également. En tout cas, cette pièce m'en a donné l'envie.


Vous pourriez être étonné par les connexions et les liens tenus entre ses deux œuvres. Les deux n'ayant, pourtant rien à voir. Je conseillerais vivement de profiter de cette pièce associée au livre.


Les femmes se sentiront certainement touchées et concernées et les hommes un peu dérangés. Mais c'est aussi ça, le théâtre !



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