
Sentinelles : Trois amis. Une passion. Et l’art comme champ de bataille
- Bonfils Frédéric
- 19 juin
- 3 min de lecture
Théâtre Paris-Villette — Jean-François Sivadier électrise la scène avec une pièce brûlante sur le génie, l’amitié et le vertige de créer.
Un trio de pianistes surdoués. Une école d’élite. Un concours qui peut tout faire basculer. Avec Sentinelles, Jean-François Sivadier signe un uppercut théâtral où la musique devient lutte, la parole devient partition, et l’amitié une épreuve de feu. Du théâtre comme on l’adore : physique, vibrant, viscéral.
Trois corps, trois visions, une seule fièvre : l’art
Ils s’appellent Mathis, Swan et Raphaël. À 15 ans, ils se promettent de conquérir le monde à coups de gammes et d’accords parfaits. Dix ans plus tard, il ne reste qu’un champ de ruines : l’un triomphe, l’autre enseigne, le troisième s’est effacé. Que s’est-il passé ? Sentinelles raconte cette trajectoire en clair-obscur, entre génie et solitude, entre rêves d’absolu et désillusions brutales.
Inspiré du Naufragé de Thomas Bernhard, Sivadier ne fait pas une adaptation mais une transposition organique, portée par trois comédiens électrisants. C’est une histoire d’amitié. Mais aussi une déclaration de guerre. Une guerre de styles, de valeurs, de mondes.
L’art peut-il changer le monde ou doit-il s’en foutre ?
Les trois protagonistes ne sont pas seulement amis : ce sont trois manifestes incarnés : Raphaël veut guérir le monde avec son piano. Swan croit à l’émotion pure, au lyrisme, à la beauté. Mathis rejette tout : la société, les sentiments, Mozart - même Chopin, « de la crème pour bourgeois ».
Entre eux, une tension permanente. Des joutes verbales jouissives. Des clashs d’idées aussi drôles que dévastateurs. Et cette question qui plane : jusqu’à quel point l’art peut-il nous séparer de ceux qu’on aime ?
Pas un piano. Et pourtant, la musique est partout.
Ici, aucun instrument. Et pourtant, tout sonne. Grâce à une créativité bouleversante et une direction d’acteurs millimétrée, des corps traversés d’énergie, un plateau épuré sculpté par la lumière, Sentinelles fait entendre la musique autrement. Le souffle devient rythme. Les gestes deviennent notes. Les silences deviennent cris.
Vincent Guédon (Mathis) est tout simplement renversant. Samy Zerrouki (Swan) émeut par sa douceur tendue. Julien Romelard (Raphaël) incarne la passion du partage. Trois bêtes de scène, trois solistes habités, trois flammes que Sivadier laisse s’enflammer.
Ce qu’on voit. Et ce qui disparaît.
« Et si une œuvre d’art ne pouvait exister qu’à condition de disparaître aussitôt qu’on l’ouvre ? Que feriez-vous ? »
Cette phrase claque en fin de spectacle. Elle résume Sentinelles. Un théâtre de la fugacité. Une célébration de ce qui ne dure pas, mais frappe fort. Une fresque sur la beauté qui s’efface, mais laisse des traces au fer rouge. La musique comme métaphore de la vie : à la fois éphémère… et inoubliable.
Un geste théâtral, un coup de cœur politique
Sentinelles parle de musique, oui. Mais surtout de nous. De notre besoin d’absolu. De reconnaissance. D’être compris. Dans un monde où les concours remplacent les étreintes, où l’excellence isole, Sivadier nous tend la main. Il casse l’entre-soi. Il bouscule les certitudes. Il nous donne envie de croire encore à la force de l’art, du collectif, de la scène.
Un spectacle rare. Brillant. Déchirant. Essentiel.
Avis de Foudart 🅵🅵🅵🅵
INFOS PRATIQUES
Sentinelles
Texte, mise en scène, scénographie Jean-François Sivadier
Avec Vincent Guédon, Julien Romelard, Samy Zerrouki
Création son Jean-Louis Imbert
Lumières Jean-Jacques Beaudoui
Regard chorégraphique Johanne Saunier
Photo Jean-Louis Fernandez
Théâtre Paris-Villette
Du 11 au 21 juin 2025 • Durée 2h20

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