Comme tu me vois - Récits d’une grossophobie ordinaire : corps à cœur ouvert
- Bonfils Frédéric
- il y a 5 jours
- 2 min de lecture
Un seul-en-scène magistral sur la grossophobie ordinaire
Ils sont rares, ces spectacles qui touchent à ce point. Rares, ces textes qui, sans hurler, parviennent à renverser nos certitudes. Avec Comme tu me vois, Grégori Miège nous offre un bijou de théâtre engagé : intime, pudique, terriblement humain. Un seul-en-scène coup de poing, coup de cœur, qui fait tomber les masques grossophobes en douceur… mais sans concession.
Un corps, mille voix
Seul en scène sur un plateau nu, Grégori Miège ne joue pas : il incarne. Il habite une multitude de récits, entre témoignages, récits de soins, souvenirs d’enfance et confidences murmurées. Ces paroles, parfois autobiographiques, parfois collectées par les sociologues Arnaud Alessandrin et Marielle Toulze, dessinent les contours d’une discrimination encore trop peu représentée : la grossophobie ordinaire.
Pas de grand cri, pas de leçon. Juste une parole incarnée, vibrante, bouleversante.
Théâtre de la résonance
Le spectacle commence par un bombardement de chiffres – glaçants : 63 % des collégiens disent avoir subi ou entendu des remarques sur leur poids. Puis très vite, on bascule dans la chair, dans l’émotion. Un rendez-vous humiliant chez le nutritionniste, une remarque assassine d’un parent, une danse de honte et de tendresse devant son propre miroir… Tous ces fragments composent une mosaïque de vies brisées, cabossées, mais aussi puissantes, fières, debout.
C’est cette porosité entre l’intime et le politique, entre la honte intériorisée et le désir de réappropriation, qui rend Comme tu me vois si bouleversant.
Une mise en lumière sensible
La scénographie minimaliste laisse toute la place à la parole. Et pourtant, le corps de Miège est omniprésent. Sculpté par les lumières subtiles de Stéphane Babi Aubert, il devient tour à tour immense, fragile, spectral, flamboyant. Lorsqu’il entame une lente valse en sifflotant le générique de Strip-Tease, c’est tout un monde qui bascule – et nos larmes avec lui.
Le théâtre devient ici un espace de réparation. Un lieu où un corps peut exister sans être jugé, réduit, humilié. Juste exister. Et c’est bouleversant.
Une parole qui libère
Comme tu me vois ne donne pas de leçon. Il tend un miroir. Il dérange, fait rire, émeut. Il désarme, comme le souhaitait Miège. C’est une œuvre précieuse, rare, nécessaire. Un moment de théâtre qui laisse des traces longtemps après la tombée du rideau. Et qui donne envie, sincèrement, de faire un peu mieux. D’écouter davantage. De regarder autrement. Avis de Foudart 🅵🅵🅵🅵
Infos pratiques
Comme tu me vois - Récits d’une grossophobie ordinaire
Texte et mise en scène : Arnaud Alessandrin, Grégori Miège, Marielle Toulze
Avec Grégori Miège
Création lumière : Stéphane Babi Aubert
Scénographie : David Bobée
Le Train Bleu – Avignon Off 2025
Du 5 au 24 juillet à 18h45 (relâches les 11 et 18) • Durée : 1h15 – Dès 13 ans


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